Auteur célèbre, doté d’une intelligence humaine rare qui lui permet de donner à ses romans une empreinte inégalable, Stéphane Zweig s’en sert aussi pour observer avec honnêteté intellectuelle les phénomènes de « guérison par l’esprit » dans un livre qui réunit 3 biographies passionnantes (Mesmer, Mary Baker, Freud). C’est avant tout la préface, son introduction, sa vision personnelle qui m’a plu, dont certains extraits que je souhaite partager avec vous.
Voici le premier :
« La maladie n’est plus un phénomène qui s’attaque à l’homme tout entier, mais seulement à un de ses organes (Virshow au congrès de Rome dit « il n’y a pas de maladie générale, mais seulement des maladies d’organes et de cellules »). La mission originelle du médecin qui était de combattre la maladie en la traitant comme un tout, se transforme naturellement en une tache, au fond, plus médiocre : localiser tout mal et sa cause et le classer dans une catégorie de maladies systématiquement décrite et déterminées. Dés que le médecin a mené à bien son diagnostic et désigné la maladie, il a fait la plupart du temps le principal, et le traitement se poursuit de lui-même par la « thérapie » prescrite à l’avance pour ce « cas ». La médecine moderne, science établie sur la connaissance et entièrement détachée de toute religion, de toute magie, s’appuie sur des certitudes absolues au lieu de faire appel aux intuitions individuelles (…). La médecine n’exige plus comme jadis de ses disciples une prédestination sacerdotale ni des dons de visionnaires leur permettant de communiquer avec les forces universelles de la nature : la vocation est devenue métier ; la magie, système ; le mystère de la guérison, connaissance des organes et science médicale. Une guérison ne s’accomplit plus comme une action morale, un événement miraculeux, mais comme un fait purement raisonné et calculé par le médecin (…). Là où l’ancienne méthode de guérison magique réclamait la plus haute tension de l’âme, le clinicien a besoin de toute sa lucidité et de tout son sang-froid. »
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